Le gouvernement a organisé deux réunions – en audioconférence – les 23 mars et 21 avril de 7 cultes (Fédération protestante de France (FPF), Conférence des évêques de France, Consistoire israélite de France, Conseil français du culte musulman (CFCM), Église orthodoxe de France, Fédération bouddhiste, Conseil national des évangéliques de France (CNEF), 5 obédiences maçonniques (Grand Orient de France, Grande Loge de France, Grande Loge nationale française, Droit humain, Grande Loge féminine de France) et 1 associations (Comité Laïcité République (CLR).
Le 26 mai dernier, nous avons publié un article intitulé “CoViD-19 et liberté de culte : deux poids, deux mesures …” au titre évocateur : ” La liberté de culte jouirait-elle d’une prééminence sur toutes les autres libertés fondamentales ? ” qui faisait suite à ces réunions.
Bien que membres à part entière du Comité Laïcité République et ayant donc à ce titre été représentés à ces réunions, les DDEN (Délégués Départementaux de l’Éducation nationale) ont tenu à réagir sur le fond de manière fort juste nous semble-t-il, lors de la Visio conférence du Collectif laïque national du 13/05/2020.
Pour information, vous trouverez ci-après leur analyse.

Faisant suite à la convocation, par le Président de la République, les 23mars et 21 avril de sept cultes, cinq obédiences maçonniques et une association aux réunions en audioconférence organisées sur le thème de « l’état moral des Français ».

Cette réunion institutionnelle pose questions à la Fédération nationale des DDEN

Au regard de la seule question institutionnelle, les organisations invitées ne sont pas, directement, concernées. Ni les cultes, ni les obédiences ni l’association CLR n’ont à se justifier. Chaque organisation n’a de compte à rendre qu’à ses mandants. Ce que certaines ont fait.

Pour nous DDEN, cette invitation du Président de la République, garant du principe constitutionnel de laïcité, pose un problème institutionnel fondamental.

Dans ce cadre du Collectif laïque national, les DDEN estiment que nous nous devons, pour celles des organisations qui le veulent, prendre position sur l’opportunité institutionnelle de ces deux réunions qui contreviennent aux principes fondamentaux de la République. Notre Collectif laïque national n’a jamais manqué de le faire en de telles circonstances avec les organisations qui souhaitaient signer, sans possibilité de veto de celles qui s’y refusent.

Une non-réaction de notre Collectif serait fort mal comprise par notre Fédération alors que nos statuts nous invitent, de façon permanente, à l’article 1er, parmi d’autres objets : « de défendre la laïcité sous toutes ses formes »

Avec ces deux réunions c’est, bien exclusivement, le Président de la République qui ne respecte pas le principe constitutionnel de laïcité dont il est le premier dépositaire institutionnel.

Le Conseil constitutionnel n’a jamais jugé que la loi de Séparation des Églises et de l’État du 9 décembre 1905 a en soi valeur constitutionnelle. C’est le caractère laïque de la République, affirmé à l’article 2 de la Constitution, qui a valeur constitutionnelle.

Nous avons donc deux principes à valeur constitutionnelle, d’une part la laïcité de l’Etat [Le Conseil d’État a été explicite « La laïcité est un principe fondamental reconnu par les lois de la République » (CE 6 avril 2001 SNES recueil p.170)] « qui impose une totale neutralité à l’État et à fortiori à l’ensemble des personnes publiques » (CE Avis 3 mai 2000 Mlle Marteaux recueil p.169). qui implique, nécessairement, la neutralité de l’ensemble des personnes publiques, pour, d’autre part, assurer la liberté de conscience de chacune et chacun des citoyens.

La neutralité de l’État est consubstantielle à la laïcité française, principe constitutionnel. De fait, la neutralité s’impose aux responsables institutionnels pour assurer le respect des convictions et croyances de tous les citoyens et de respecter la liberté de conscience de toutes et tous.

La laïcité française est juridiquement égalitaire et vaut pour tous les cultes et aucun ou quelques-uns, en particulier. Cela, au nom de la non-reconnaissance institutionnelle de tous les cultes sans exception. La laïcité française a donc reconnu à tous les cultes les mêmes droits et obligations. Cette définition universaliste interdit, au nom de la neutralité de l’État, d’en choisir ou privilégier aucun. Le « devoir d’impartialité de l’État, est incompatible avec un pouvoir d’appréciation de la part de l’État quant à la légitimité des sept cultes invités.

Avant le 9 décembre 1905 existait un service public du culte. L’État avait organisé quatre cultes conformément au Concordat explicite de 1802.

Aujourd’hui ce service public du culte est rétablie élargi, le Président de la République en reconnait sept aujourd’hui, selon un néo-concordat implicite.

Le silence de notre Collectif laïque national serait mal compris par tous ceux qui reconnaissent notre volonté, unitaire, affinitaire et permanente de défendre et promouvoir la Laïcité comme principe constitutionnel garanti par la neutralité de la puissance publique pour préserver l’absolue liberté de conscience de chacune et chacun.

Pour la Fédération des DDEN
Eddy Khaldi
13 mai 2020

Mis en ligne le 03 Juin 2020 21:10