CDAFAL 95

Charlie Hebdo

Le Journal du Dimanche, dans son édition dématérialisée de ce 9 décembre, publie, sous le titre « une vingtaine de présidents de départements sonnent “l’alerte républicaine” » une tribune à l’initiative de 19 Présidents de Conseils Départementaux de gauche à l’occasion de l’anniversaire de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État. Ils demandent des actes !
Nous ne ferons pas la fine bouche : mieux vaut tard que jamais ! Mais il eut été encore plus judicieux de présenter une telle tribune alors que cette Gauche était elle-même au pouvoir ; peut-être aurions-nous pu éviter certains des débordements, certaines des dérives – y compris d’élus de gauche – que nous connaissons aujourd’hui. Peut-être aurions-nous sauvé Charlie-Hebdo, Samuel Paty et tous les autres, morts innocents qui s’inscrivaient dans les valeurs de la laïcité et les défendaient. Peut-être aurions-nous sauvé toutes ces femmes de mariages forcés, d’excisions … pratiqués au nom de traditions immondes ! A laisser prospérer l’intolérance religieuse au nom du droit à la différence – entretenant ainsi une confusion regrettable entre le droit à la différence et la différence des droits qui ne peut s’inscrire dans un état laïque – les politiques par complaisance et électoralisme se sont faits, même s’ils s’en défendent, les complices objectifs des dérives identitaires, ont préparé le lit des “séparatistes”.
Est-ce parce qu’ils ne sont plus au pouvoir qu’ils s’autorisent à parler ?
Ne boudons pas notre satisfaction ! … mais restons lucides : les crimes commis par des décérébrés obscurantistes au nom d’une religion qu’ils méconnaissent, visent, comme le soulignait récemment l’avocat Richard Malka au procès de l’attentat de Charlie Hebdo, d’abord les valeurs de liberté, de démocratie, de fraternité … qui fondent la République. La référence à une religion n’est qu’un cache sexe !

TRIBUNE :

Laïcité : une vingtaine de présidents de départements sonnent “l’alerte républicaine”

 A l’occasion de l’anniversaire de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat, 19 présidents de départements de gauche demandent des actes : “Combien de temps encore allons-nous laisser l’intolérance, la haine et le fanatisme mordre sur la République”, écrivent-ils.

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Charlie Hebdo

Mercredi 9 décembre, jour anniversaire de l’adoption de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat, le gouvernement présente en Conseil des ministres, un projet de loi “confortant les principes républicains” (celui un temps nommé “contre les séparatismes”). Dans ce texte que nous publions, 19 présidents de conseils départementaux de gauche célèbrent “l’une des plus belle loi” de la Ve République mais lancent “une alerte républicaine” : “Parce que nous n’avons pas été assez offensif sur la laïcité nous avons laissé des brèches se former.”

Voici leur tribune :

Le 16 octobre dernier, Samuel Paty a été lâchement assassiné plongeant notre pays dans l’effroi et la stupeur. Une nouvelle fois, la République était frappée. Une nouvelle fois la barbarie attaquait nos valeurs, défiait notre devise. Alors que ce 9 décembre marque la date anniversaire de la loi de 1905, combien de temps encore allons nous baisser la garde. Combien de temps encore allons-nous laisser l’intolérance, la haine et le fanatisme mordre sur la République.

Il y a plus de 100 ans, des Hommes libres et éclairés donnaient à la République l’une de ses plus belles lois, l’une de ses fondations. La laïcité devenait le socle solide d’une société où les croyances individuelles n’étaient plus un obstacle à la vie collective. Elle créait un espace commun où chacun se définit par son appartenance à la République et non son parcours personnel, confessionnel, communautaire. Depuis la laïcité est au cœur de notre identité.

La grande loi de 1905 reste un texte d’apaisement. Elle garantit à chacun le droit de croire ou de ne pas croire. Elle assure que nul ne soit inquiété pour ses opinions philosophiques ou religieuses. La laïcité a ceci de particulier qu’elle est, au même titre que la solidarité qui nous unit, l’une des conditions essentielles à l’exercice concret de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. Trois mots issus de la Révolution française tout comme les Départements que nous représentons.

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« Nous n’avons pas été assez offensif
sur la laïcité nous avons
laissé des brèches se former. »

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Mais aujourd’hui ce socle est attaqué. Face à des assauts incessants, il s’érode. Alors que partout le fait religieux revient sur le devant de la scène, que les divisions et les fractures minent notre contrat social,

aujourd’hui nous lançons l’alerte républicaine.

Parce que nous n’avons pas été assez offensif sur la laïcité nous avons laissé des brèches se former. Croyant ce combat définitivement gagné, nous avons laissé la confusion s’installer.

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Certains voudraient nous faire croire que la laïcité a vécue. Qu’il faut la revoir, la rendre “positive”, “inclusive”, “ouverte”. Vouloir qualifier la laïcité c’est déjà la diminuer, la fragiliser. C’est méconnaitre notre histoire et affaiblir notre société. C’est déjà reculer devant les intégrismes de toutes natures.

Si toutes les convictions religieuses méritent le même respect, la même attention, elles n’ont pas à s’imposer dans l’espace collectif. Comme le disait Victor Hugo “l’État chez lui, l’Église chez elle”. Car l’État laïc est un état neutre mais ce n’est pas un État faible. Il porte des valeurs. Liberté de conscience, respect de la personne humaine, égalité Femme-Homme, rationalité. Assumons-les. Défendons-les. Enseignons-les.

Pour cela, ne détournons pas le regard sur l’état de notre société. La montée du fondamentalisme religieux, de l’antisémitisme, la recrudescence insupportable du racisme et de l’homophobie fracturent notre pacte républicain. Face à l’accroissement des revendications communautaires et alors que certains veulent imposer un relativisme culturel mortifère pour nos libertés, nous avons besoin d’une parole forte, d’une parole ferme, d’une parole claire. Nous avons besoin de la laïcité.

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« Nous devons lutter
avec la même force et la même
détermination contre ceux qui se
servent de la laïcité pour
la détourner de son sens »

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Dans le même temps où nous menons ce combat face à la menace fondamentaliste, nous devons lutter avec la même force et la même détermination contre ceux qui se servent de la laïcité pour la détourner de son sens. Ceux qui utilisent les mots de la République pour stigmatiser, mettre à l’index et dresser les français les uns contre les autres.

Ce sont toujours les mêmes qui, après avoir combattus la République et son message universel, cherchent désormais à remettre en cause ses principes. Sous couvert d’une laïcité qu’ils trahissent, ces recalés de l’histoire voudraient désormais hiérarchiser les croyances. En défendant l’idée que certaines religions sont incompatibles avec la République, ils opposent, classent, hiérarchisent. Ils ne supportent pas l’égalité. Mais, pour reprendre le message de Jaurès dès 1904 ; la laïcité est indissociable de l’égalité “Il n’y a pas d’égalité des droits si l’attachement de tel ou tel à une croyance ou à une religion est une cause de privilège ou une cause de disgrâce”.

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La Liberté guidant le peuple. E. Delacroix – 1830

Dans nos territoires nous œuvrons sans relâche pour lutter contre ces deux maux.

Lorsque les Départements engagent des parcours citoyens et laïcs dans les collèges, ils agissent pour ouvrir l’esprit de nos jeunes sur les valeurs républicaines. Lorsque les Départements conditionnent les aides associatives au respect d’une charte de la laïcité, ils luttent contre toutes les tentations du repli communautaire. Lorsqu’ils organisent des conférences, expositions, débats ils affirment l’attachement sans faille qu’ils ont pour la République laïque.

Formation de leurs agents, Charte de la Laïcité, “Chemins de la République”, parcours laïc et citoyens… Les Départements s’engagent au quotidien pour défendre les principes d’une république Laïque.

Nous savons la tâche immense. Elle ne peut être l’œuvre des seuls pouvoirs locaux. Toute la société doit être mobilisée car la laïcité concerne autant l’éducation que la vie en entreprise. Elle s’exerce dans de l’espace publique comme dans l’organisation de la vie sociale.

C’est pourquoi nous en appelons aujourd’hui à un nouveau pacte laïc entre l’État, les collectivités, et les corps sociaux.

La laïcité ne manque pas de mot, désormais elle a besoin d’acte.”

Les Président.es de Département signataires :

Philippe Grosvalet (Loire-Atlantique), Sophie Borderie (Lot-et-Garonne), Christophe Ramond ( Tarn), Josette Borel-Lincertin (Guadeloupe), Xavier Fortinon (Landes), Nathalie Sarrabezolles (Finistère), Jean-Luc Gleyze (Gironde), Hermeline Malherbe( Pyrénées orientales), Alain Lassus (Nièvre), Jean-Claude Leblois (Haute-Vienne), Philippe Martin (Gers), Georges Méric (Haute-Garonne), Kléber Mesquida (Hérault), Sophie Pantel (Lozère), Germinal Peiro (Dordogne), Hélène Sandragné (Aude), Christine Téqui (Ariège), Stéphane Troussel (Seine-Saint-Denis), Laurent Ughetto (Ardèche).

Mise en page, titres, typographie
et introduction sont de la rédaction

Mis en ligne le 09 Déc. 2020 – 19:00
Mise à jour le 09 Déc. 2020 – 19:45