Selon une tribune signée de nombreuses organisations et publié dans Reporterre “Le quotidien de l’écologie” le 15 janvier dernier (Cf. les signataire à la fion de l’article),
Le gouvernement a créé une cellule militaire pour surveiller les opposants à l’agro-industrie.
Le 13 décembre, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, s’est rendu dans le Finistère en compagnie de la présidente de la FNSEA, dans le cadre d’une convention signée entre son ministère et ce syndicat agricole et de lancer une cellule de la gendarmerie nationale appelée Déméter. Elle a pour but de lutter contre l’”agribashing”.
Ne s’agit-il pas, surtout, de “faire taire tous ceux qui mènent des actions symboliques contre le système de l’agriculture industrielle” ?
Anomalie démocratique en faveur de l’agro-industrie, encore une fois le CNAFAL s’élève contre de telles pratiques !
Le gouvernement veut « faire taire tous ceux qui mènent des actions symboliques contre le système de l’agriculture industrielle », dénoncent de multiples défenseurs de l’agriculture paysanne et biologique, réunis dans cette tribune.
Ils s’inquiètent fortement de la création de la cellule de renseignement Demeter, lancée fin octobre, soi-disant destinée à lutter contre l’« agribashing ».
Il y aura un avant et un après Demeter. Le 13 décembre, le ministre de l’Intérieur de la République française Christophe Castaner s’est rendu dans le Finistère en compagnie de la présidente de la FNSEA Christiane Lambert. Dans le cadre d’une convention signée entre son ministère et ce syndicat agricole.
Cette première anomalie démocratique — depuis quand la police républicaine est-elle aux ordres d’une structure privée ? — n’est pas la dernière, de loin.
En effet, ce voyage avait pour but principal de lancer une cellule de la gendarmerie nationale appelée Demeter, la déesse grecque des moissons. Et marque reconnue, depuis des lustres, de l’agriculture sans pesticides. Quel en est le but affiché ? La lutte contre « l’agribashing ».
Ce terme est une invention des communicants de la FNSEA, qui prétend sans en apporter la moindre preuve qu’on assisterait en France à une entreprise concertée de dénigrement du monde agricole. Elle permet à ce syndicat de maintenir ce qu’elle fait depuis des dizaines d’années : une pression lobbyiste pour obtenir en retour des avantages économiques.
Le ministre, confronté avec son gouvernement à une situation politique difficile, a donc décidé de jouer ce rôle dangereux, affirmant par exemple : « Depuis quelques années, un phénomène grandit, inacceptable. De plus en plus, nos agriculteurs sont visés par des intimidations, des dégradations, des insultes. »
Empêtré dans cette imprudente déclaration, le ministre démontre dans le même texte qu’il est incapable de prouver par le moindre fait la réalité de ce phénomène. Les chiffres qu’il cite pour 2019 parlent d’eux-mêmes : sur la base de 440.000 exploitations agricoles, les plaintes portent sur 314 tracteurs volés, 24 vols avec violence, 657 voitures dérobées.
Encore faut-il préciser que les vols avec violences ont diminué en un an de 31,4 %. La plupart des centres urbains se damneraient pour de telles statistiques. Il est visiblement plus simple de mobiliser la police que de régler la situation dramatique de la paysannerie française.
Il y a encore plus grave. Volontairement, n’en doutons pas, M. Castaner mélange dans un stupéfiant gloubi-boulga la délinquance vile — cambriolages, vols de matériel, incendies, dégradations —, les occupations de terres agricoles par des gens du voyage, les actions antifourrure ou antichasse. C’est mettre sur le même plan criminel le vol, le droit des populations nomades, celui de la critique sociale et politique.
Il y a encore plus grave. M. Castaner entend s’attaquer dans le cadre de Demeter, ainsi qu’il l’écrit, aux « actions de nature idéologique, qu’il s’agisse de simples actions symboliques de dénigrement du milieu agricole ou d’actions dures ayant des répercussions matérielles ou physiques ».
Cette fois, on aura compris : il s’agit de faire taire tous ceux qui mènent des actions symboliques contre le système de l’agriculture industrielle, dont la FNSEA est le principal soutien.
La démocratie, ce n’est pas pactiser avec les lobbies dans le dos de la société.
Qui mène « des actions symboliques » contre ce système ?
Le mouvement des Coquelicots, qui réclame la fin des pesticides, soutenu par un million de citoyens. Les maires qui prennent des arrêtés contre ces poisons chimiques. Des dizaines de milliers de paysans qui ont déjà choisi l’agriculture biologique. Beaucoup d’autres, qui défendent le modèle de l’agriculture paysanne contre les projets délirants d’usines à vaches, à cochons ou à poulets. Et au total des centaines de milliers de citoyens engagés contre l’importation massive de soja transgénique et donc l’élevage industriel, contre la mort des oiseaux et des insectes, pour des rivières débarrassées de la pollution et des rivages sans algues vertes, enfin pour une alimentation de haute qualité.
Il ne fait aucun doute, à nos yeux, qu’une ligne a été franchie.
La démocratie, ce n’est pas pactiser avec les lobbies dans le dos de la société.
Et quand le ministre parle « d’améliorer [la] coopération avec le monde agricole et de recueillir des renseignements », chacun comprend ce que cela veut dire.
Cela signifie l’intimidation accrue de tous les adversaires décidés de la FNSEA, qui passe nécessairement par la surveillance électronique et informatique, d’éventuelles écoutes téléphoniques, voire des filatures, des infiltrations, ou pire encore, la délation.
Nous prévenons solennellement le gouvernement que nous refusons cette criminalisation et que nous demandons le démantèlement de la cellule Demeter.
Notre contestation de l’agriculture industrielle, non-violente, se fait et se fera au grand jour, dans la conviction d’exprimer la volonté majoritaire de la société française.
Nous voulons beaucoup de paysans, beaucoup plus de paysans, heureux et fiers de leur métier, enfin payés au prix convenable pour leur participation au bien commun. C’est en effet un autre monde que celui de la FNSEA.
Liste des signataires :
Valérie Murat, porte-parole de l’association Alerte Aux Toxiques !
Pierre-Michel Périnaud, président d’Alerte des médecins sur les pesticides
Sylvie Nony, secrétaire d’Alerte Pesticides Haute Gironde
Khaled Gaiji, président des Amis de la Terre
Jean-francois Lyphout, président de l’Aspro-Pnpp
Pierrick De Ronne, président de Biocoop
Gwenola Kervingant, présidente de Bretagne Vivante
Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes de Canopée
Michel Besnard, du Collectif de soutien aux victimes des pesticides de l’Ouest
Marie-Lys Bibeyran, du Collectif Info Médoc Pesticides
Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne
Joël Spiroux de Vendômois, président du Criigen
Alain Bonnec, président d’Eau et rivières de Bretagne
Jean-Luc Toullec, président de la Fédération Bretagne Nature Environnement
Guillaume Riou, président de la FNAB
Eric Feraille, directeur de FNE Aura
François Veillerette, directeur de Générations futures
Jean-François Julliard, directeur de Greenpeace France
Arnaud Apoteker, délégué général de Justice Pesticides
Daniel Cueff, maire de Langouët (35)
Patrick Lespagnol, président du Mouvement de l’Agriculture Bio-Dynamique
Eliane Anglaret, présidente de la fédération Nature & Progrès
Fabrice Nicolino, président de Nous voulons des coquelicots
Jean-Yves Bohic, président de Ragster
Carole Le Bechec, présidente du Réseau Cohérence
Jean-François Baudin, président du Réseau Amap Auvergne-Rhône-Alpes
Florent Mercier, co-président du Réseau Semences Paysannes
Jacky Bonnemains, directeur de Robin des bois
Thierry Thévenin, porte-parole du syndicat Simples
Gilles Lanio, président de l’Union nationale de l’apiculture française (UNAF)
Benjamin Sourice, co-président de Combat Monsanto
Mis en ligne le 19 janv. 2020